Codex, écriture picturale de Jean-Pierre Petit

De quoi le roman pictural chez ce peintre est-il le nom, dans cette œuvre qui s’affirme
comme scripturaire, toujours ?
Sans titre il s’énonce et se développe comme une vis sans fin, au fil des œuvres
successives qui annoncent les prochaines, sans désemparer.
La présence d’une grammaire secrète et d’une syntaxe étrange s’affirme
comme un voyage au long cours, dont le seul but serait seulement le voyage.
D’abord la peinture et encore, mais contre toute attente le narratif pictural devient récit.
Une histoire nous est contée, flux de signes précipités, lignes et couleurs
dans l’organisation spatiale du subjectile.
Disons qu’il s’agit d’une fable qui n’aurait ni commencement ni fin, dont on ignorait
le propos et le dessein. Chaque tableau est juste un nouvel indice ou le début
d’un nouveau chapitre.
Chaque œuvre pourrait apparaître comme un récitatif à la gloire de la vie, flux textuel
ininterrompu sur la toile. Cette écriture figurative et abstraite à la fois, hiéroglyphique
du sensible en partage, nous donne à voir dans le temps long de la production des
formes heureuses un dévoilement de l’œuvre dont l’éclosion reste cachée.
La narration du texte pictural comme un labyrinthe nous entraîne dans une aventure
inédite entre l’image et l’écrit.

C’est le roman de la vie mis en oeuvre dans l’intuition du réel poétiquement posé
par une mise en forme en mouvement perpétuel. Ce mouvement perpétuel énonciatif
empreint de musicalité d’un gai savoir secret est à la fois familier et mystérieux.
Mises bout à bout toutes ces pages picturales, le moment venu, constitueront
le grand livre du peintre, celui de sa propre existence.
Alors apparaîtra un conte fantastique quand la peinture dans sa totalité recouvrira
comme un palimpseste le territoire de l’inconscient ouvert sur le monde,
livre d’images écrites aux pinceaux.
[Michel Rocherieux, avril 2023]