Participe présent

Presque du jour au lendemain, Jean-Pierre Petit s’est mis à produire dans le secret de son atelier,
à peindre sur tous les supports qui lui “tombaient sous la main”, de grandes toiles, des colonnes,
des kakemonos, des séries à l’infini, – comme investi par des leitmotiv qui l’habitaient depuis
sa jeunesse et devaient jaillir aujourd’hui en flot vif et énergique et continu.
Ces leitmotiv ont vécu au creux de son âme, j’en suis sûre, ils se sont nourris de son inconscient,
j’en suis sûre, et de ses oppositions au monde contemporain, pour sûr ! Ils se sont fortifiés au vent
de l’injustice, ils ont envahi ce matin son espace et le nôtre et nous disent “Bas les masques”.
Nous ne voulons pas y échapper, notre regard est happé par ces parcours labyrinthiques,
par ces visages hypnotiques et moqueurs, ceux de la grande “Métropole”. Une invasion qui nous
interpelle, qui nous demande de nous positionner, de réagir. La neutralité ou pire l’isolationnisme
n’est plus d’actualité, nous devons intervenir à ses côtés.
Le travail de Jean-Pierre Petit nous implique forcément et nous demande d’apporter,
en toute liberté, une pierre à l’édifice. Ces œuvres érigent une architecture mentale, psychologique,
des espaces à investir de nos vies. On ne regarde pas une toile de Jean-Pierre Petit, on la visite,
on s’y promène… même quand “La nuit est incertaine”. La troisième dimension est ressentie
dès lors qu’on s’y attarde. De plus, les espaces sont mouvants car, selon l’intensité du regard,
les couleurs primaires cernées de noir construisent des reliefs aléatoires. Parménide disait
« On ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve ». Comme un fait exprès, le peintre
a une volonté de nous contrarier dès qu’on s’installe dans une vision, une habitude,
une interprétation. Alors la toile nous chahute et nous emmène sur un autre chemin, bouscule
nos certitudes ; il faut reprendre la quête et, de nouveau, comme dans les carrefours de la vie
nous sommes entraînés sur une nouvelle voie.