Artiste
Plasticien
Designer
Un ouvrage de Gaston Bachelard s’intitule “L’intuition de l’instant” ;
la seule réalité du temps est celle de l’instant, c’est-à-dire le monde
imaginé avant d’être compris.
Ainsi, si ta peinture était un Monde, on l’appellerait totem,
si elle était une phrase, on l’appellerait mantras, une prière, on l’appellerait chamanique.
Ces péréquations entre surfaces planes peintes et ressenties
ne sont possibles que par l’épure de la réalisation,
une manière sobre quoique somptueuse,
quasi-monacale de montrer l’invisible
en expansion de l’instinct de vie
par une économie de moyen pesée
au trébuchet et pourtant explosive.
C’est à dire exactement le contraire d’une peinture bavarde.
Une écriture à l’écoute du vivant, du corps,
de la nature, de l’univers, du désir…
Une écriture d’une pensée qui s’allonge
dans le désert et qui regarde la voie lactée
en comprenant qu’il s’agit de soi.
Jean Pierre Petit, de toute évidence nous parle
de ce moment de la nuit du siècle où tout peut arriver.
C’est le moment quand les chiens cessent d’aboyer,
les enfants naissent, le vent qui s’évanouit,
la végétation qui se tait, quand la vie retient son souffle.
C’est un temps peu avant l’aube d’un messianisme
politique comme le concevait Walter Benjamin.
Ce messianique qui s’annonce mais qui nous est
seulement promis c’est les oriflammes et les sculptures
à venir de Jean-Pierre Petit qui sont autant de fanaux
dans la cité, comme des signaux d’espérance et d’alerte
peut être aussi de rédemption.
Ce trait noir et lumineux qui perce l'espace du temps
et de l'univers m'entraîne vers cet absolu, me montre
le chemin où je reconnais au passage les totems laissés
par l'humanité.
Le dessin se fait précis, sûr de lui-même et me révèle
cet inconnu qui m'attendait.
Le chemin se trace jusqu'à la couleur qui appelle à son tour
le désir d'humanité, de plénitude du monde et de l'univers.
Ces signes, cet alphabet de la vie, tracent le récit d'un instant
de vérité, d'une ombre de bonheur, d'une humanité à venir.
L'espace créé entre en résonance avec tous les possibles
et offre la clé à qui veut bien retrouver son regard d'enfant.
La force évoquée est sans doute multipliée
par l’aération de la surface peinte par le blanc
qui marque la puissante respiration du tableau
avec le noir comme rehaut.
Chaque oeuvre pourrait apparaître comme un récitatif à la gloire
de la vie, flux textuel ininterrompue sur la toile. Cette écriture
figurative et abstraite à la fois, hiéroglyphique du sensible en
partage, nous donne à voir dans le temps long de la production
des formes heureuses un dévoilement de loeuvre dont l’éclosion
reste cachée.
La narration du texte pictural comme un labyrinthe nous
entraîne dans une aventure inédite entre l’image et l’écrit.
C’est le roman de la vie mis en oeuvre dans l’intuition du réel
poétiquement posé par une mise en forme en mouvement
perpétuel, mouvement perpétuel énonciatif empreint de
musicalité d’un gai savoir secret à la fois familier et mystérieux.